Communication en entreprise : comment déjouer les biais cognitifs ?

Sommaire

C’est l’histoire d’un manager qui voulait comprendre pourquoi la communication entre ses équipes était brouillée. Friture sur la ligne ? Non, simplement la chimie du cortex humain qui trouble le message. Pourquoi ? Car cette merveilleuse machine qu’est le cerveau crée des raccourcis de pensées pour alléger la charge mentale. Merci à lui ! Seulement voilà, les processus cérébraux sont parfois détournés. On parle alors de biais cognitifs. Une information, une croyance, et bim ! Les capacités cognitives, poussées à leurs limites, analysent mal les données, perturbent la compréhension et engendrent des réactions irrationnelles, voire insensées. Notre dirigeant, soucieux d’assainir les relations dans son service, va donc adorer cet article : les biais cognitifs et la communication en entreprise. Il y trouvera même des solutions pour réduire ces distorsions cérébrales. 

Biais cognitifs et communication en entreprise

Oui, les raccourcis de pensée sont indispensables. Imaginez-vous réfléchir aux 35 000 décisions que nous prenons chaque jour : penser avant d’ouvrir votre dossier ou attraper votre agenda ! Chacune nécessite de choisir entre coûts et bénéfices, nous rappelle l’Institut du cerveau.

Au travail comme dans la sphère privée, notre inconscient cherche des alternatives pour répondre à quatre situations. Le codex des biais cognitifs nous les détaille :

  • le flux d’informations professionnelles ;
  • le manque de sens du monde, donc de l’environnement au travail ;
  • le besoin d’agir vite ;
  • les éléments à retenir.
biais cogntifis

Les fonctions cognitives génèrent alors des raccourcis neuronaux, des réflexes de pensée censés être rationnels et systématiques. Le cerveau filtre la masse de données et propulse directement à une conclusion. Il part d’un bon sentiment : nous faire économiser du temps et de l’énergie pour des décisions rapides. Mais, dans son élan, il confond parfois réalité et croyance. Ces déviations psychologiques brouillent le raisonnement et influencent nos jugements, nos perceptions, voire notre mémoire. Nos prises de parole en réunion, nos décisions face à un client ou fournisseur s’avèrent donc inadaptées. Oserons-nous parler d’illusions d’objectivité ?

Dans les années 70, des neuroscientifiques tels que Daniel Kahneman et Amos Tversky étudient les processus cognitifs. Ils définissent 4 limites :

  • notre cerveau occulte des faits ;
  • notre mémoire renforce les erreurs ;
  • un jugement rapide peut s’avérer mauvais ;
  • la quête de sens génère des illusions.

Dans cet article, intéressons-nous aux biais qui floutent la communication, grippent le message. Bref, les biais qui compliquent les relations en entreprise, entre équipes, collaborateurs, managers et autres hiérarchies. C’est parti !

Biais de confirmation ou confirmation d’hypothèse au travail

Le biais de confirmation incite à privilégier les informations qui corroborent l’idée préconçue ou l’hypothèse de départ. 

On omet de prendre en considération la véracité des données. On juge sur la cohérence par rapport à l’idée de base et non sur les faits.

Le cerveau interprète les données à son avantage. On parle de « tirer la réalité à soi ». 

En entreprise, ça donne quoi ?

Chaque employé est attiré par les paroles de celui qui valide ses convictions.

Lors d’une réunion, un collègue ne rebondit que sur les affirmations de celui qui a le même point de vue. 

Le biais de confirmation se complète parfaitement avec son alter ego : « le biais de l’autruche ». Le collaborateur ignore les informations défavorables à sa démarche.

Charge au manager de ramener la discussion au bon sujet..

👉 Autre exemple

Vous entrez en séminaire persuadé que vos équipes vont s’opposer à votre projet. Vous vous focalisez alors sur les « non » même s’ils représentent une minorité de réactions.

Enfin, lors d’un conflit, chaque salarié taxe l’autre de mauvaise foi. Ça ne vous rappelle rien ?

Comment minimiser le biais de confirmation ?

L’esprit critique ! Déjà, en 2019, le World Economic Forum insistait que cette soft skill qu’est la capacité d’analyse. Elle ressort comme compétence clé à considérer dans les recrutements. Elle permet cette prise de recul, ce pas de côté qui donne de la valeur à l’argumentation. Elle élève le débat des réunions commerciales. Les collaborateurs apprennent à régler des situations complexes en autonomie et de manière créative. Ce déploiement de raisonnements dialectiques et objectifs aide à la prise de décision juste.

Le manager peut se former au questionnement et gagner en agilité cognitive pour assainir les échanges entre ses équipes.

Le biais de perception sélective face à un collaborateur

Le biais de perception sélective incite à favoriser une information plutôt qu’une autre. Forme de partialité, cette attitude pousse à interpréter les données de manière à nous conforter dans nos convictions, voire croyances. En fait, nos espoirs ou aspirations influencent notre compréhension et vision de la réalité.

La mémoire sélective ne retient que ce qui est susceptible de confirmer sa propre vision.

Proche de « l’effet de halo », le collaborateur ne voit que ce qu’il souhaite.

La perception sélective au travail

Concrètement, en entreprise, la perception sélective biaise la vision que l’on a des collaborateurs, concurrents ou autres services.

👉 Exemple

Vos équipes remarquent plus de fautes venant des autres services qu’il n’en existe. Exactement comme un supporter ne voit que les erreurs du groupe adverse.

Comment lutter contre le biais de perception sélective ?

Là encore, la meilleure arme est l’esprit d’analyse et de critique constructive. Apprendre à poser les bonnes questions et user d’inférences logiques contraint le collaborateur à identifier ses croyances. Il comprend alors que sa vision, ses peurs impactent son jugement.

La problématisation répond aussi au biais de perception sélective. Dresser les faits et expliquer son raisonnement fait la lumière sur bien des distorsions.

Cela permet de rester focalisé sur le projet lui-même. On ne s’éparpille plus sur les soi-disant torts des autres équipes ou services.

La communication devient plus sereine, car chacun se détache de ses propres centres d’intérêts et valeurs. Tous travaillent alors dans un but commun. Youpi, répondent les performances.

Le biais de représentativité quand on est manager

L’heuristique de représentativité

Le biais de représentativité incite à attendre des autres des facultés déterminées selon des statistiques et non des données personnelles. Ce principe viole la loi la plus fondamentale de la probabilité. Inconsciemment, on communique en partant du principe que l’autre pense ceci ou est en capacité de faire cela.

La méthode LMX démontre que les managers classent leurs collaborateurs dès les premiers jours de travail. Avec le biais de représentativité, ils se créent de fausses attentes, infondées et irrationnelles.

La représentativité envers un nouvel employé

👉 Exemple

Vous recrutez un jeu diplômé d’une haute école de commerce : vous en attendez une confiance en soi infaillible. Une thèse de l’Université de Lyon II invoque « l’erreur de conjonction ». Avoir confiance en soi est un critère reconnaissable chez nombre d’étudiants de grandes écoles. Soit ! Pour autant, tous les élèves n’ont pas extrêmement confiance en eux.

L’heuristique de représentativité consiste à substituer son jugement à une estimation. 

Comment éviter l’effet de représentativité ?

L’intelligence émotionnelle : l’outil anti-préjugé

Faire appel à l’intelligence situationnelle et émotionnelle permet au manager de faire la part des choses entre l’attendu et la réalité. Se concentrer sur le nouveau salarié, ses réactions, aide à mieux le connaître. Être attentif à ses émotions, identifier ses forces et ses faiblesses reste la méthode la plus adaptée pour se faire une opinion juste et trouver le ton juste de sa communication.

😉 Le petit plus de Smyle : 

Accordez-lui le temps de faire ses preuves et laissez le système se révéler à lui-même. Il sentira votre confiance en lui. En effet, un des biais les plus connus en management est l’effet Pygmalion. Il représente, pour un manager ou un dirigeant d’entreprise, une parfaite solution contre les dissonances cognitives. 

Développer son intelligence émotionnelle permet de tourner les biais cognitifs à son avantage en toute honnêteté et impartialité.

Le biais d’ancrage dans les relations de travail

Vous avez dit ancrage ?

Ici, le premier qui parle a raison. En psychologie, le terme « ancrage » signifie : rester figé sur sa première impression. Les premières informations reçues influent sur la prise de décision, quels que soient les arguments avancés par la suite. On pose un élément de référence, puis nos réflexions se définissent autour de ce dernier.

À noter qu’il peut se montrer utile et particulièrement efficace en négociation commerciale ou salariale : soyez le premier à proposer un chiffre. Il sert alors de jalon pour la discussion à suivre.

Les neurosciences à la rescousse du manager

D. Kahneman obtient le prix Nobel d’Économie avec son ouvrage Système 1, Système 2, les deux vitesses de la pensée. Il y conseille de se poser et d’engager une vraie réflexion cartésienne. On aboutit alors à une analyse objective qui pallie le biais d’ancrage. Il s’agit de remettre en cause la rationalité fondamentale de la pensée.

Les biais décisionnels

On notera en conclusion qu’échouer à reconnaître ses propres biais cognitifs représente un biais à part entière : le biais de l’angle mort. Vous l’avez compris, conscientiser les déviances neuronales de ses collaborateurs aide le manager à rétablir le bon ton relationnel entre ses équipes. Non pris en compte, les biais cognitifs freinent sérieusement la communication.

Je suis un manager sensible à la performance des relations, je veux être coaché pour que mes équipes gagnent en performances.

Autres sources :

L’institut du cerveau : la prise de décision

Daniel Kahneman

Amos Tversky

👉 Pour bien comprendre

Daniel Kahneman, psychologue, a posé une question à deux groupes d’individus.

Au premier groupe : « Gandhi est-il mort avant ou après l’âge de 9 ans ? »

Au second groupe : « Gandhi est-il mort avant ou après l’âge de 140 ans ? »

Des années plus tard, le premier groupe se souvient d’un âge de décès autour de 50 ans, les autres l’estiment à 70.

Voilà pourquoi les enseignes adorent exposer un prix barré. Le cerveau retient ce prix comme référence. Le client se focalise alors sur la remise.

😉 Le petit plus de Smyle pour bien comprendre :

Notre système nerveux réagit en deux fois. Le système 1 réagit très vite, à l’instinct. Le système 2 analyse. Voilà pourquoi, vous sursautez quand une porte claque. Le système 1 vous alerte d’un danger potentiel. En vous retournant, vous réalisez que le vent a fermé la porte : le système 2 vous fait alors comprendre qu’il n’y a aucun souci.

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