Triangle de Karpman : 3 rôles d’un jeu de pouvoir inconscient

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Issu de l’analyse transactionnelle, le triangle infernal sonde les relations malsaines pour mieux les résoudre. Inventé dans les 60’s par le psychologue Stephen Karpman, il sert d’outil pour gérer les conflits et assainir les rapports délétères et malfaisants. Trois statuts émergent de cette observation : le Sauveur, la Victime et le Bourreau. Jeu psychologique inconscient, il entraîne ses protagonistes dans une relation toxique qui les épuise. À l’instar d’une tragédie, chacun dépend et se nourrit de l’autre, d’où le terme dramatique. Ce 1er article d’une série de 4 explique les 3 rôles du triangle de Karpman. Les suivants analyseront chaque persona et proposeront de vraies solutions pour y faire face. Montons ensemble sur les planches de cette pièce de théâtre incarnée par les 3 figures emblématiques. Mesdames et Messieurs, rideau !

Triangle de Karpman : un jeu psychologique inconscient

Pourquoi le mot « jeu » ? Karpman fait référence à l’enjeu inconscient qui se cache derrière ces comportements : le goût du risque de la  perte ou de l’appât du gain, tel le joueur de poker. En 1964, dans son livre, Des jeux et des hommes, Eric Berne qualifie le triangle comme un « déroulement d’une série de transactions cachées, complémentaires, progressant vers un résultat bien défini, prévisible ».

Chaque personne tient un rôle favori et en appelle forcément un complémentaire. Toutes sont reliées par des interactions négatives.

  • La victime cherche un sauveur ou un persécuteur.
  • Le sauveur et le persécuteur courent après une victime.

Il faut être deux pour ce trio

Paradoxe : le triangle de Karpman appelle au minimum deux protagonistes. Ah ?! Non, nous ne remettons pas en cause les fondamentaux de la géométrie. Chacun revêt naturellement un rôle. Et ce dernier n’a de sens que s’il trouve son alter ego. Sans Victime, pas de Persécuteur. Sans Persécuteur, pas de Sauveur, etc.

À noter que l’on retrouve ici le triptyque classique du conte narratif : le héros victime (Blanche-Neige), le méchant (la belle-mère) et le héros sauveur (le Prince charmant). Karpman lui a d’ailleurs choisi l’épithète « dramatique » en référence au drame théâtral qui se joue à trois. On remarque cependant que deux personnages suffisent pour entamer le jeu.

Le jeu des chaises musicales

Comme dans le jeu des chaises, le rôle choisi dans le triangle de Karpman évolue. Il dépend de la situation et des interlocuteurs. Parfois, on se convertit même au milieu d’une conversation.

Ainsi,

  • le Sauveur peut devenir Victime ;
  • la Victime se change en Persécuteur ;
  • le Persécuteur se métamorphose en Sauveur.

C’est le fameux coup de théâtre en comédie dramatique ou phénomène de renversement des rôles.

Une personne qui se victimise face à ses collègues peut, en revanche, jouer le persécuteur à la maison.

Pourquoi jouer un rôle ?

Tout d’abord, rappelons que ces comportements restent inconscients.

Chaque statut du triangle infernal génère des bénéfices secondaires personnels. C’est pourquoi il est parfois difficile d’en prendre conscience et de vouloir réellement sortir du schéma.

👉 La posture de Victime procure l’impunité, la possibilité de ne pas répondre de ses actes. S’imposer Victime revient à se considérer pur et innocent.

👉 Le rôle de Bourreau confère une illusion de pouvoir. Il permet d’évacuer ses frustrations sur plus faible que soi.

👉 Enfin, le statut de Sauveur nourrit l’égo. Il s’entoure d’êtres plus faibles ce qui lui donne l’impression d’être plus solide qu’il ne l’est réellement.

💡 Intéressant

Les 3 rôles identifiés dans le triangle trouvent un écho dans les 4 mythes mis en valeur par Éric Berne, le fondateur de l’analyse transactionnelle. Il conceptualise les jeux psychologiques et en ressort 4 grandes croyances.

  1. J’ai le pouvoir de rendre les autres heureux.
  2. Les autres ont le pouvoir de me rendre heureux.
  3. J’ai le pouvoir de rendre les autres malheureux.
  4. Les autres ont le pouvoir de me rendre malheureux.

Et revoici le Sauveur, la Victime et le Persécuteur.

Le rôle de Victime dans le triangle dramatique

😢 « J’ai besoin d’aide, car je suis faible ».

À ce titre, la Victime se considère en droit de se plaindre. Elle attire l’attention sur elle.

Pourquoi se poser en martyr ?

Souvent en manque affectif, la Victime souffre et cherche la compassion, la protection et l’attention. Elle se trouve constamment et de manière répétée dans des situations où elle est écartée et blessée.

Souvent dans l’incapacité à prendre ses responsabilités, elle rejette la faute sur le Persécuteur ou sur le Sauveur. Elle se conforte dans son image de personne irréprochable. Après maintes plaintes, elle dénigre les solutions que son Sauveur lui propose et lance son fameux « oui, mais ». Ainsi, elle reste dans son rôle.

À savoir que si la Victime ne trouve pas dans son entourage un Bourreau digne de ce nom, elle le créera. Vous l’entendrez alors se lamenter d’un trop-plein de travail, d’un logiciel inadapté ou d’horaires inconfortables.

Pour résumer la Victime

Vous l’entendrez proférer ce type de phrases.

😢 Quoi que je fasse, ça ne sert à rien.

😢 Moi, je n’ai jamais eu de chance.

😢 Tout le monde est contre moi, etc.

Le Persécuté :

  • a conscience de sa souffrance réelle ou potentielle ;
  • agit comme s’il n’avait pas les ressources nécessaires pour résoudre son problème ;
  • reste dans la jérémiade permanente ;
  • se sent impuissant et irresponsable.

💡 Astuce de Smyle pour les managers

Lorsque vous faites face à un collaborateur qui joue le rôle de Victime, renforcez sa confiance en lui. Donnez-lui les clés pour avoir la puissance d’agir et d’oser. Repositionnez-le sur son problème du moment. Faites-lui exprimer sa demande réelle cachée derrière la plainte.

L’article à venir relatif au statut de Victime vous renseignera sur les comportements adaptés.

Le statut de Bourreau dans le trio infernal

👺 « Je sais ce qui est bien ou mal, je dois dire aux autres quoi faire et comment. »

Que cherche le Persécuteur ?

Il s’impose par la violence (verbale ou physique). Il s’emploie à écraser son interlocuteur. Il empoigne sa baguette et corrige ou punit la moindre erreur. Il n’hésite pas à dévaloriser l’autre et le faire culpabiliser. On parle de redresseur de torts, de justicier ou de donneur de leçons. Il peut même tendre des pièges pour prendre en faute et mieux réprimander.

Et si au fond de lui, il était déçu de la vie ou de lui-même ? Le despote s’avère souvent mal à l’aise dans ses relations. Il éprouve des difficultés à vivre la frustration. Il exige pour canaliser ses propres peurs.

Pour résumer le Bourreau

Il prononce les allégations suivantes.

👺 Je ne cesse de te le répéter.

👺 Tu te trompes à chaque fois.

👺 J’ai raison, tu as tort, etc.

Le Persécuteur :

  • n’agit que dans son propre intérêt ;
  • fait souffrir autrui ;
  • donne des leçons ;
  • tente, entre autres, de punir.

💡 Astuce de Smyle pour les managers

Vous reconnaissez un collègue dans ce portrait de Bourreau ? Adoptez une assertivité tranquille et osez dire stop dans les situations extrêmes.

Ci-dessous la méthode OSBD pour favoriser le dialogue.

Notre article à venir réservé au rôle du Persécuteur vous aidera encore davantage.

osbd

Le syndrome du Sauveur dans le triptyque

🦸 « Les autres ont besoin de moi ».

Pourquoi endosser la cape du super héros ?

Notre chevalier des temps modernes place, en fait, la Victime sous son autorité et la rend dépendante. Sous couvert de sauver les autres, il les rend incapables de faire sans lui. Il veut qu’on lui fasse confiance, il en tire sa propre satisfaction.

On retrouve souvent parmi les Sauveurs, d’anciennes Victimes d’un précédent triangle de Karpman, dans l’enfance notamment. Traumatisé par ses besoins inassouvis et frustré par ses attentes non répondues, il va de l’avant et agit alors même que personne ne lui a rien demandé.

À l’instar des deux autres statuts, il n’a pas d’intérêt à sortir du triangle. Il y perdrait toute raison d’être. La Victime comme le Persécuteur justifient son existence.

Pour résumer le Sauveur

L’entendez-vous ?

🦸 Je n’ai pas le temps, mais je vais t’aider quand même.

🦸 Si je fais cela, c’est pour te dépanner.

🦸 Heureusement que je suis là, etc.

Ce soi-disant héros :

  • se soucie malgré tout sincèrement de la Victime ;
  • prend à sa charge le processus de pensée et de résolution de problèmes ;
  • fait plus qu’il ne le souhaite vraiment et plus qu’il ne devrait ;
  • agit inconsciemment pour son bien et non celui de la Victime.

Contrairement au « Sauveteur », il ne corrige pas la situation. Il pallie les difficultés au coup par coup, mais n’évite surtout pas que le schéma se reproduise.

💡 Astuce de Smyle pour les managers

Vous sentez que vous avez tendance à endosser ce rôle dans votre management ? Laissez vos interlocuteurs formuler clairement leur demande. Donnez-leur la permission pour agir seuls, se développer et s’épanouir.

Je relis l’article relatif aux 3 P du manager.

Le triangle de Karpman est un outil très pertinent pour les managers. Il permet d’identifier les déviances de comportement de ses collaborateurs. La prise de conscience et la transposition sur ses équipes sont les premiers pas vers un leadership plus efficace face à des relations compliquées.

Victime, Bourreau ou Sauveur, qui est le gentil, qui est le méchant ? Peu importe. Vous l’avez compris, intégrer cette triade s’avère toujours malsain. Le rôle du manager sera donc triple lui aussi : ne pas entrer dans le triangle, en sortir et aider ses collaborateurs à faire de même, quel que soit leur statut. Nos prochains articles répondent à cette problématique : repérer le jeu, l’accepter, mettre en place les comportements adaptés.

Je suis manager. Offrir à mes équipes des relations saines est une priorité, je contacte Mylène pour être coaché.

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Sources :

Cairn :

Le site de l’analyse transactionnelle : les jeux psychologiques

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